LES VINS DU CHILI, APRÈS LE SÉISME!

Il a donc affecté le Valle Central, qui est la principale zone de production de raisin et de vin du Chili. On est encore à évaluer les dégâts; on sait qu’il y a eu perte de vin, des dommages dans des chais et des vignes arrachées. Néanmoins, les Chiliens en ont vu d’autres et se sont déjà relevé les manches pour aller de l’avant.

UNE ÉTRANGE GÉOGRAPHIE! 

Le Chili est le pays le plus long de l'Amérique du Sud, avec 4 300 kilomètres du nord au sud. C’est aussi le pays le plus étroit du continent, avec entre 90 et 400 kilomètres de largeur. D'un côté, il est bordé par l’océan Pacifique et de l’autre, par la Cordillère des Andes, perdue dans les nuages. Au nord, il y a le désert d’Atacama qui couvre un quart du pays, au sud, les terres froides de l’Antarctique chilien qui se terminent à la Patagonie, laquelle regarde le pôle Sud. Coincé entre ces quatre destins, se trouve le Valle Central, au climat méditerranéen, qui a des jours ensoleillés et des nuits froides. Le terrain parfois pauvre est idéal pour la vigne, car 117 000 hectares de vignobles de grande qualité s’y épanouissent. Le succès du vin chilien est tel, qu’on gruge maintenant des terres improbables pour planter plus de vignes, pour produire des vins différents, et c’est ainsi qu’on plante des vignobles sur la Cordillère des Andes, on avance sur le désert d’Atacama, on descend dans les froides terres du sud et, par miracle, les Chiliens réussissent encore à y faire du bon vin.

Le vignoble chilien est cultivé dans des vallées qui ont des noms très jolis. Tout au nord il y a Elqui, Limari, Choapa; au centre : Aconcaggua, Maipo, Casablanca San Antonio, Cachapoal, Colchagua, Currico, Maule; plus au sud : Itata, Bio Bio, Malleco. L’aventure du vin a commencé au Chili il y a quatre siècles, lorsque les conquistadors espagnols, ne sachant que faire de ces terres assez pauvres où il n’y avait ni or ni argent, se mettent à planter la vigne.  Quelle formidable intuition!

Le vignoble moderne tel que nous le connaissons aujourd’hui commence néanmoins au 19^e siècle. Le Chili, comme tous les autres pays sud-américains, proclame son indépendance de l’Espagne en 1810. La bourgeoisie chilienne est très francophile. Les familles aisées envoient leurs fils étudier à Paris, elles adoptent les modes françaises et boivent du Bordeaux. Les vins sont chers, le transport long et incertain. Vers le milieu du 19^e, Silvestre Ochagavia,  Luis Cousiño  et quelques autres aristocrates chiliens décident de mettre en valeur leurs grandes propriétés, importent des cépages bordelais de Cabernet Sauvignon, de Sémillon et de Merlot et font venir des experts français pour faire du vin.  La vigne prospère, les vins sont bons.

Quelques années plus tard, le vignoble mondial est dévasté par le phylloxera, mais le Chili est le seul pays à être épargné. On pense à son isolement géographique, au système d’irrigation intensive, à la présence de cuivre dans les rivières chiliennes, à cause des mines.  Partout, les producteurs sont obligés de cultiver en greffant sur pieds; c'est  seulement au Chili que les vignes sont cultivées sans greffe et le pays devient le conservatoire des plants d’origine.  En Europe, les plants greffés ont une espérance de vie de 30, parfois de 60 ans. Au Chili, il y a des pieds qui ont 150 ans et qui donnent des vins complexes et uniques.  Certains cépages, comme le Carmenère, qui étaient disparus du vignoble bordelais, se sont perpétués au Chili. Les vignobles de Saint-Émilion essaient de le réintroduire avec le problème que ce cépage, une fois greffé, n’est pas très productif, tandis qu’au Chili, cultivé sur pieds-de-vigne, il l’est. 

Aujourd’hui, les principales variétés cultivées au Chili pour les vins blancs sont le Chardonnay, le Sauvignon blanc, le Riesling, le Gewürztraminer, le Viognier et le Sémillon. Pour les rouges, le Cabernet Sauvignon, le Carmenère, le Merlot, le Malbec, le Pinot noir et le Syrah. Avec 6 millions d’hectolitres, le Chili est le dixième pays producteur mondial et le cinquième pays exportateur de vins au monde.

J’ai devant moi deux bouteilles de Viña Montes. Ils sont représentés au Québec par Whitehall Agencies inc. (tél. : 514 828-9463). Le premier vin est un Sauvignon Blanc Montes Sélection Limitée Valle de Leyda 2008. (SAQ 16,70 $). Il a une robe jaune, claire, brillante. Arômes intenses de pamplemousse, de buis, de genêt, de fruit de la passion. En bouche, beaucoup de fraîcheur, d'élégance. Une bonne acidité et une finale longue et intéressante.

Le deuxième vin est un Pinot noir Montes Sélection Limitée Valle de Casablanca 2009 (SAQ 17,60 $). Ce vin a une robe rubis intense, plus foncée que la plupart des pinots noirs. Arômes de fruits rouges, de canneberge, d'épices, de pain grillé, mais aussi floral, tirant sur la violette. En bouche, il est puissant, avec une touche de minéralité, mais surtout fruité, vanillé, des tanins ronds, une belle élégance, un vin structuré, complexe, une acidité parfaite, un équilibre charmant entre les tanins et l’onctuosité. Néanmoins, il est encore jeune, et avant de le boire, il a besoin d’être décanté en carafe. Je conseillerais d’acheter maintenant et de garder deux ans et plus et alors, pour une fraction de prix d’un pinot européen, vous aurez un très bon pinot.

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